Ecrivain, poète et chantre de la négritude
Aimé Césaire en janvier 2007 à Fort-de-France (AFP/Eric Feferberg)Né le 26 juin 1913 à Basse-Pointe en Martinique, Aimé Césaire fait ses études à Louis-le-Grand, où il rencontre Léopold Sedar Senghor.
En 1934, avec Léon Gontran Damas, Léopold Sédar Senghor et Birago Diop, il crée "L'étudiant noir" où apparaît pour la première fois le concept de "négritude" : revaloriser et promouvoir l'Afrique et sa culture, à contre-courant du colonisateur qui s'est employé à dévaloriser celles-ci. Projet culturel autant que politique, la Négritude est d'abord un humanisme et une solidarité proclamée avec tous les opprimés de la terre ("Je suis de la race de ceux qu'on opprime").
Après ses études à Normale Sup, Aimé Césaire retourne en Martinique en 1939. Pendant la guerre, il rencontre André Breton, qui le salue comme un frère en surréalisme. L'auteur de "Nadja" rédigera d'ailleurs la préface du recueil "Les armes miraculeuses".
En 1945, Césaire est élu maire de Fort-de-France, puis député (il le restera jusqu'en 1993). En 1956, après la répression de Budapest, il quitte le Parti communiste et fonde le Parti progressiste martiniquais, qui revendique l'autonomie de la Martinique. L'écrivain fait alors des allers-retours entre Fort-de-France et Paris, où il crée la revue "Présence africaine". La revue deviendra ensuite une maison d'édition qui publie, entre autres, les travaux de l'égyptologue Cheikh Anta Diop.
Une poésie exigeante
Parallèlement, Césaire continue son oeuvre de poète marqué par le surréalisme (Corps perdu, Cadastre, Moi, laminaire...).
Une oeuvre exigeante, où se mêle à une superbe langue française des expressions issues des îles, sans jamais donner dans l'anecdotique, le pittoresque ou le régionalisme. Le poète dit la douleur, la souffrance, l'humiliation, mais aussi la fraternité :
"Partir
Comme il y a des hommes-hyènes et des hommes-panthères,
je serai un homme-juif
un homme-cafre
un homme hindou de Calcutta
un homme de Harlem qui ne vote pas...
mais est-ce qu'on tue le Remords, beau comme la
face de stupeur d'une dame anglaise qui trouverait
dans sa soupière un crâne de Hottentot?"
("Cahier d'un retour au pays natal")
La dénonciation du colonialisme
Son plus célèbre texte politique, le "Discours sur le colonialisme" ("Il faudrait d’abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l’abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer que, chaque fois qu’il y a au VietNam une tête coupée et un oeil crevé et qu’en France on accepte, une fillette violée et qu’en France on accepte, un Malgache supplicié et qu’en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une régression universelle qui s’opère, une gangrène qui s’installe...") a été publié pour la première fois en 1950. Cette charge virulente compare le colonialisme au nazisme, auquel l'Europe vient à peine d'échapper. Elle a été pour la première fois inscrite au programme du baccalauréat en 1998.
A partir de 1956, Césaire se consacre davantage au théâtre : "Et les Chiens se taisaient" porte sur la décolonisation, "La tragédie du roi Christophe" évoque Haïti et "Une saison au Congo" met en en scène Patrice Lumumba, héros de l'indépendance du pays. Aimé Césaire a aussi consacré un essai à Toussaint Louverture, qui a mené pendant la Révolution française une lutte victorieuse pour libérer les esclaves de Haïti avant de devenir gouverneur de Saint-Domingue.